Rencontre avec un artiste #1 : Yeoran

"J'aime qu'il n'y ait pas de vérité pure"

Bonjour mes petits sapins, épicéas, pommes de pins, tout ce que vous voulez !

Si j'étais moins impatiente, j'aurais attendu la semaine prochaine pour publier cet article. Mais j'étais tellement enthousiaste à l'idée de le publier que j'ai craqué. J'avoue être vraiment fière et contente du résultat. C'est l'article le plus abouti que j'ai fait jusqu'à maintenant. Bref, j'espère sincèrement que cela va vous plaire.

Aujourd'hui, je commence donc une nouvelle rubrique qui me tient particulièrement à cœur "Rencontre avec un artiste". Parce que oui, je vous avais dit que ce blog n'était pas qu'un blog de mode. Je n'ai pas envie de simplement montrer mon look du jour et d'écrire trois phrases dessus, j'ai envie d'un peu plus de fond, de rencontres, de découvertes.

Et justement, aujourd'hui je vous présente Julien, alias Yeoran, photographe amateur de 19 ans. J'ai découvert sa page Facebook avec ses photos il y a environ un an et demi car j'avais des amis qui avaient participé à certains de ses shootings. J'ai tout de suite accroché à son univers décalé et fantastique. En créant ce blog, je désirais vraiment parler de gens comme lui, et il y a environ un mois, je l'ai contacté sur Facebook pour faire une interview. Par chance, il a tout de suite accepté !  Nous avons fait l'interview hier, et puis lors d'une pose goûter (McDo à 15h tout est normal), il s'est mis à me montrer de quelle façon il faisait ses bodypaints. Et puis nous avons vadrouillé un peu partout, pour finalement nous retrouver au parc pour un test de shooting, tout ça en parlant parlant et parlant. Ne vous fiez pas au GIF, c'est quelqu'un que très gentil, sympa et sociable. Il est réellement passionné, il aurait pu me parler pendant des heures de ses projets, ses idées, de ce qu'il a en tête (je ne vais rien spoiler, je suis muette comme une carpe). Bref, c'est une vraie belle rencontre. Alors MERCI (encore) puissance 10 000, Julien !

(je précise que seuls le GIF , la vidéo et la photo ci-dessous sont de moi, le reste c'est made in Yeoran)

D'où et quand t'es venue cette passion pour la photographie ?

J'en ai toujours un peu fait, sans forcément avoir un bon appareil photo entre les mains. Avant j'avais un appareil pourri, un numérique qui fait des photos toutes moches. Je faisais déjà deux, trois photos avec mes amis, dans des petites mises en scène, même si ce n'était pas aussi poussé que maintenant. On peut dire que vers la quatrième, troisième j'avais déjà commencé. J'ai débuté ma page en 2012, après un BAC blanc, pendant une période creuse. C'était la grande mode des pages photo sur Facebook donc j'avais envie de faire quelque chose pour me démarquer. Mon père étant parti en vacances une semaine sans moi et j'avais l'appartement pour moi tout seul. Du coup, chaque jour, j'ai invité un de mes amis proches de l'époque à venir chez moi faire un shoot. C'est comme ça que sont nés les sept premiers shootings de Yeoran. A la fin de la semaine, j'ai fait un montage de leur shoot, qu'ils ont publié sur leur mur avec un lien vers la page. Comme la page s'appelait Yeoran, personne ne savait que c'était moi le photographe. Pendant une semaine et demi, les gens ont commencé à aimer la page et les photos sans savoir que c'était moi (sans mentir je n'étais pas très populaire). C'est comme ça que tout a commencé.  Yeoran m'a permis de parler à plein de gens, d'être beaucoup plus ouvert et sociable (pas que je ne le sois pas). C'est comme un outil grâce auquel j'ai pu devenir plus proche des gens.

Quelles sont tes inspirations ?

Je m'inspire d'un peu de tout et de n'importe quoi. Énormément des dessins animés et des films que je regarde, surtout des mangas. Je m'inspire aussi beaucoup des films de Miyazaki comme "Princesse Mononoké", "Le château ambulant", tous ces films là. Après ça peut paraître un peu gamin, mais Pokémon et tous ces univers un peu fantastiques, c'est complètement mon délire. Fairytail, Naruto... Même si je ne suis pas complètement calé, je m'inspire des accessoires, de l'ambiance, des couleurs, etc... Niveau peintres j'aime beaucoup Van Gogh et Picasso, surtout pour les couleurs de leurs tableaux. Keith Haring aussi. Niveau photographes, j'aime beaucoup le travail de Tyler Schields. Il travaille énormément avec le flash, c'est assez vif et coloré avec du punch, parfois bling bling. Terry Ridchardson aussi même si c'est un peu plus provoc'.  Je m'inspire aussi énormément de musique. Pour chaque shooting, il y a une musique qui correspond. Quand j'écoute de la musique, les images, les personnages et les noms me viennent. Lorsque je télécharge de nouvelles musiques me viennent de nouvelles idées.

Qu'essaies-tu de faire passer à travers ton travail ?

Il y a eu une espèce de gros débat là dessus. Il y a eu toute une période où les gens voulaient absolument que j'explique mon travail, qu'il y ait un message caché derrière mes photos. Au début ce la m'agaçait un peu parce que je m'inspire de choses assez visuelles, de dessins animés, de films, de lieux (je passe mon temps à me balader en forêt). Je n'ai pas vraiment de message à faire passer, c'est surtout dans le visuel et l'esthétique. C'est comme si j'avais encore 12-13 ans, que je m'amusais à mettre de la peinture sur les gens, à prendre deux, trois tissus colorés et à les jeter en l'air pour que ça fasse joli. Je n'ai pas envie d'exprimer un mal être profond. Mais parfois il y a telle ou telle histoire que j'ai envie de raconter. Mon objectif est surtout de dépayser les gens. Je sais très bien que quand les gens viennent voir les photos ce n'est pas pour passer leur vie dessus ou comprendre tout de A à Z. C'est assez instantané, tu rentres du lycée, du boulot, tu vois deux, trois photos et voilà. Ce que j'aimerais c'est que les gens prennent simplement le temps d'échapper à la réalité. Je préfère qu'ils s'approprient la photo, que chacun ressente et invente ce qu'il veut. Déjà, lorsque je donne un titre à l'album, cela oriente un peu. Mais je n'ai pas envie de tout expliquer par A + B. D'ailleurs, quand je montre les photos à des adultes ou à des adolescents, ils ne voient pas tous la même chose. J'aime qu'il n'y ait pas de vérité pure.

Une citation qui t'inspire...

Je ne pourrais pas en  citer une exactement mot pour mot, mais j'aime beaucoup Pierre Boterro. C'est un auteur de fantaisy dont j'aime beaucoup les citations. Il travaille beaucoup au niveau de l'imagination. Je pourrais citer aussi Antoine de Saint Exupéry, j'ai toujours le Petit Prince dans mon sac. J'adhère particulièrement à ce genre de philosophie, détachée du monde réel, basée sur l'imaginaire, l'invention, et le monde des enfants plus que celui des adultes. Je suis un peu encore dans un univers enfantin. C'est pour cela que ça m'énerve un peu quand on me demande de m'expliquer et de donner un sens à ce que je fais.

D'où viens le nom Yeoran ?

C'est un pseudo que je me suis inventé quand j'étais en 6ème. Le nom entier c'était Yeoran Shalliy d'ailleurs. A l'époque j'écrivais un livre (que j'écris encore mais c'est un peu plus secondaire), et c'était mon pseudo d'écrivain. On avait des cours au CDI où ils expliquaient le parcours du livre et ils nous disaient que certains auteurs prenaient un pseudonyme, du coup je me suis dit que ce serait marrant d'en avoir un. Quand j'ai voulu créer la page, je n'avais pas envie d'une page nommée "Julien Roux Photographies", qui ressemble aux 60 millions de pages qu'on peut trouver sur Facebook, personne n'allait adhérer. Du coup j'ai décidé de reprendre ce pseudo. Yeoran sonne comme une genre de marque, de signature. Il n'y a même pas d'étymologie particulière. Je ne sais plus si c'est imprégné d'un nom de Pokémon transformé ou quoi, mais c'est resté.

Peux-tu nous en dire plus à propos de ta mythologie ?

Cette mythologie me tient énormément à cœur. C'est une idée que j'ai depuis le tout début de la page. A la base, j'avais comme projet de le faire avec la mythologie grecque. J'avais trouvé tous les modèles, presque tous les lieux pour faire Apollon, Artémis, tous les dieux... Le projet est tombé un peu à l'eau. L'an dernier j'ai voulu faire une pose pour préparer une mythologie plus spécifique. J'ai repris le livre d'où Yeoran est né.Puisque j'avais dans l'idée d'arrêter la photo, j'aurais pu revenir à mon livre sans que les gens ne perdent mon univers. J'ai commencé à retravailler cette mythologie.  J'ai tout un cahier rempli de mythes et de croquis, ça doit bien faire 600 pages donc tout sort de là. Après je m'inspire aussi des mythes scandinaves, grecques ou romains, pour ce qui est du "fond", des relations entre les personnages, afin qu'il y ait une espèce de cohérence. J'ai vraiment réussi à faire quelque chose de construit et d'élaboré. J'ai juste eu un peu de problème pour réussir à trouver tous les participants, j'avais besoin de neige cette hiver mais il n'y en a pas eu. C'est assez frustrant d'avoir tout dans la tête sans pouvoir tout réaliser. Mais j'ai quand même beaucoup avancé. J'ai déjà 12-13 personnages. Quoi qu'il en soit je n'abandonne pas du tout.

En parlant d'abandon, il y a quelques semaines tu avais décidé de tout arrêter, avant de revenir sur ta décision (fort heureusement). Pourquoi ?

C'était justement en rapport avec cette mythologie. Tout allait bien, j'étais en train de publier les différents personnages en respectant mon planning par semaine. Un soir, je publie l'un de mes personnages préférés. J'aimais beaucoup ce shooting parce que je l'avais fait en automne (ma saison préférée), j'étais super fier des couleurs, du modèle. Quand je l'ai publié il n'y avait que deux "j'aime" ou un truc dans le genre et pendant plusieurs jours rien de nouveau dessus. J'étais frustré et ça m'a blessé que personne ne réagisse. Dans le même temps, j'étais allé voir d'autres pages d'autres photographes où les photos étaient beaucoup moins élaborées, où c'était juste des photos dans la rue comme ça. Il y avait des centaines et des centaines de "j'aime" et ça m'a beaucoup énervé. Je me suis dit que ça ne servais rien de m'acharner à faire adhérer tout le monde à mon univers si ça ne prenais pas. Autant me mettre à faire des photos pour moi, avec mon cercle d'amis et en prenant mon temps plutôt que de vouloir "acheter" les gens, récolter pleins de "j'aime" et de commentaires. Je voulais revenir aux bases, à ce que j'étais avant, un gars pas très connu qui fait juste des photos avec des gens qui ont envie, et arrêter cet espèce de contrat implicite entre les fans et le photographe. J'avais prévu de tout faire péter et de supprimer la page tout en gardant le blog. 
Et là ma meilleure amie a surgit du fin fond des herbes sauvages, elle m'a bien engueulé et m'a interdit d'arrêter. Que je ne devais pas abandonner à cause d'une petite baisse de moral. Et puis ce n'était pas la seule, j'ai eu plein de messages de gens furieux. C'est là que je me suis rendu compte qu'il y avait quand même des gens qui regardaient mes photos. Le problème avec Facebook, c'est que les gens voient mais ne réagissent pas forcément donc on a l'impression de faire cela pour rien. Quand ça ne fonctionne pas il faut arrêter ça ne sert à rien de s'acharner. 
Mais là quelque chose d'assez énorme se prépare, quelque chose de très important auquel je réfléchis depuis longtemps qui va se mettre en place. Ça va impliquer beaucoup de personnes, Yeoran va devenir plus collectif. Donc surveillez la page, je n'arrête pas, je n'arrête plus, je n'arrête jamais maintenant. 

Je ne sais pas si je peux faire une sorte de bilan d'une interview. C'est la première fois que je fais ça. Quoi qu'il en soit si je devais résumer l'esprit Yeoran, car il s'agit plus d'un état d'esprit que d'une personne, je dirais : couleur, atemporel et fou. J'espère que vous avez été "Yeoranisé" si vous ne l'êtes pas déjà. Si vous aimez, et bien montrez-le, dites-le, exprimez-vous ! Comme je vous l'ai dit c'est une rubrique qui me tient particulièrement à coeur. J'aimerais vraiment continuer à rencontrer d'autres personnes comme ça, et j'espère que cela vous a plus aussi.

Bisous ♥

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